Ensérune, des silos par centaines [Philippe Boissinot, Lionel Izac]

Dès les premières recherches menées à Ensérune, en 1843, à l’initiative de l’abbé Alexandre Ginièis (1805-1885), des structures profondes identifiées comme des silos sont mentionnées. Félix Mouret (1862-1939) fait dégager huit premiers silos sur l’oppidum puis se concentre sur la nécropole en faisant réaliser par ses ouvriers agricoles de vastes tranchées pour accéder aux centaines de fosses funéraires explorées de 1915 à 1924. C’est à l’abbé Louis Sigal (1877-1945) que l’on doit, entre 1929 et 1944, l’exploration d’une centaine de silos. On a recours à des systèmes de chèvres en bois mobile pour les vider pendant que les terrassiers opèrent en profondeur. Après la Seconde Guerre mondiale, sous l’égide de Jean Jannoray (1909-1958), les entrepreneurs comme Marcel Joucla ont recours à des engins mécaniques et à des techniques de maçonneries avec la fouille des 45 silos du secteur du « château d’eau ». Le premier chantier école de l’Université de Montpellier dirigé par Hubert Gallet de Santerre (1915-1991) mixe décapage mécanique et fouille stratigraphique pour l’étude des 71 structures en fosse de la « terrasse des silos » en 1966. Dorénavant, les fouilles qui se poursuivent sur le flanc sud, dans des quartiers inédits, démontrent l’importance de ces creusements préalablement reconnus sur le sommet de la colline. Il s’agit principalement de silos, parfois de très grand volume. Par leur nombre (des milliers ?) et leur grandeur, ils indiquent un phénomène singulier et exceptionnel, sans doute en relation avec l’économie agricole de la cité. À l’échelle des quartiers de l’agglomération, la géophysique, encore peu pratiquée, pourrait être utile pour cartographier d’éventuelles variations de densité, en lien avec le développement de la cité ou relativement à la détection d’espaces spatialisés. Le recours à des relevés photogrammétrie, laser 3D et Lidar permet de documenter les fouilles anciennes encore accessibles ainsi que les nouvelles fenêtres d’investigation ouvertes dans le cadre du Projet collectif de recherche sur Ensérune.

Auteurs

• Philippe Boissinot (Professeur à l’École des Hautes Etudes en Sciences Sociales de Toulouse)
• Lionel Izac (Administrateur de l’oppidum et du musée archéologique d’Ensérune, UMR Traces)